• LES COUPS DE COEUR DE CHARLOTTE LA MARMOTTEAujourd’hui 6 mars, fête des grands-mères, j’ai une pensée spéciale pour ces deux femmes de ma famille qui nous ont quitté depuis longtemps déjà.

    LES COUPS DE COEUR DE CHARLOTTE LA MARMOTTEMarie d’abord, la citadine que je n’ai jamais connue, disparue beaucoup trop tôt, à 34 ans. Marie que l’on disait douce et aimable, adorée de ses enfants, prise entre ces deux fortes personnalités qu'étaient celles de sa mère et de son époux. Marie la musicienne qui jouait de la mandoline et lisait des romans où les héros triomphaient toujours des forces du mal. Sa mandoline est là, quelque part, rangée dans un coin de la pièce, silencieuse depuis 74 ans. Il y a peu, en feuilletant de vieux albums photos, je suis tombée sur deux cartes postales peintes et signées de ma grand-mère. En interrogeant mes tantes, j’appris que Marie aimait aussi jouer du pinceau. Malheureusement il ne reste plus que ces deux petits cartons, échappés du vide-grenier qui suivi la mort de mon grand-père. Sans le savoir, elle nous a peut-être transmis son amour de la peinture à moi et à mes frères qui dessinent dans leur coin depuis leur plus jeune âge..

     

     

    Emilia, elle, je l’ai très bien connue. C’était la grand-mère des enfances heureuses, des vacances à la campagne au milieu des chats, du chien, des poules et des lapins… Le temps des cousins et des cousines qui se retrouvaient transformant le jardin en plaine aride du far west, pendant que les adultes refaisaient le monde autour d’un petit vin aigrelet ou d’une tasse de café. Et au milieu, ma grand-mère, toujours prête à intervenir dès que les voix s’élevaient. « Pas de politique ici » disait-elle. C’était trop sujet à discorde. Et elle faisait passer son assiette de petits gâteaux, des gaufrettes à la vanille ou au chocolat. Nous nous amusions à déchiffrer les petites phrases gravées sur les pâtisseries, les plus grands lisant pour les plus petits. Emilia aimait les chats. Il y avait toujours une ribambelle de félins qui la suivait. L’hiver, ils s’installaient autour d’elle près de la cheminée. Elle suivait les feuilletons à la télé ou les émissions de variété. Elle avait toujours aimé chanter. Autrefois, dans les repas, mon grand-père prenait son accordéon et ma grand-mère l’accompagnait en chanson. C’était l’époque pas si lointaine où les radios et les mp3 n’avaient pas encore envahi notre quotidien.

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    J’ignore si elles sont quelque part là-haut mais en tout cas je crois qu’un être aimé ne meurt jamais vraiment tant qu’on y pense.

    « N’ayant plus d’univers, plus de chambre, (…) j’étais seul, j’avais envie de mourir. Alors ma grand’mère entra, et à l’expansion de mon cœur refoulé, s’ouvrirent aussitôt des espaces infinis. (…) Je savais, quand j’étais avec ma grand-mère, si grand chagrin qu’il y eût en moi, qu’il serait reçu dans une pitié plus vaste encore ; que tout ce qui était mien, mes soucis, mon vouloir, serait, en ma grand’mère, étayé par un désir de conservation et d’accroissement de ma propre vie autrement fort que celui que j’avais moi-même. (…)

    Je me jetai dans les bras de ma grand’mère et je suspendis mes lèvres à sa figure comme si j’accédais ainsi à ce cœur immense qu’elle m’ouvrait. » Marcel Proust dans « A l’ombre des jeunes filles en fleurs ».

    " Bonne-maman avait des joues roses, des cheveux blancs, des boucles d'oreilles en diamant ; elle suçait des pastilles de gomme, dures et rondes comme des boutons de bottines, dont les couleurs transparentes me charmaient ; je l'aimais bien parce qu'elle était vieille. […] Je déjeunais chez eux tous les jeudis ; rissoles, blanquette, île flottante ; bonne-maman me régalait. Après le repas, bonne-maman sortait du buffet la toupie métallique sur laquelle on enfilait, pendant qu'elle tournait, des ronds de carton multicolore. Elle faisait avec moi des parties de dominos, de bataille, de jonchets. " (Simone de Beauvoir, Mémoires d'une jeune fille rangée).

    « Pourquoi m’as-tu quitté ? Ô toi qui m’aimais, toi qui n’as jamais été remplacée, toi qui chérissais en moi jusqu’à mes défauts, toi qui maniais comme la cire mes volontés de fer, et qui faisait courber d’un regard cette tête rebelle ! Toi qui m’as appris pour mon éternel regret, pour mon éternelle solitude, ce que c’est qu’un amour inépuisable, absolu, indestructible…Grand Dieu ! Vous savez qu’elle me l’a enseigné, cet amour passionné de la progéniture ; ne permettez pas qu’on m’arrache à mes enfants ; ils sont trop jeunes pour supporter ce que j’ai souffert en la perdant ». Lettre de George Sand à sa grand-mère.

     

     

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